Captives de réassurance : un atout stratégique pour les entreprises françaises

Dans un contexte économique en proie à une incertitude croissante, marqué par des risques émergents, variés et de plus en plus menaçants, la question de la création d’une captive de réassurance devient décisive. Cette tendance est portée à la fois par la gestion des risques des entreprises, qu’il est nécessaire de repenser et d’anticiper, et par l’évolution du cadre fiscal français, qui devient plus favorable à ces structures.

C’est dans cette dynamique, et à la suite de l’entrée en vigueur du décret n° 2023-449 du 7 juin 2023, que l’on observe une forte croissance des projets de création de captives de réassurance en France. Pour accompagner cette évolution, l’ACPR a récemment publié un guide destiné à soutenir les entreprises industrielles, commerciales ou de services dans la mise en place de ces structures en France.

Une solution sur-mesure pour la gestion des risques

Une captive est une société d’assurance ou de réassurance créée et détenue par une entreprise dans le but de couvrir ses propres risques. Alors qu’une captive d’assurance assure directement les risques de l’entreprise et/ou ses filiales, une captive de réassurance apporte une couverture complémentaire pour des risques déjà assurés par des assureurs externes.

La création de captives de réassurance constitue une réponse aux enjeux croissants auxquels sont confrontées les entreprises non assurantielles. L’augmentation structurelle des primes d’assurance sur le marché traditionnel incite ces acteurs à explorer des mécanismes alternatifs de gestion des risques. Par ailleurs, la montée en puissance des risques émergents, tels que ceux liés aux nouvelles technologies, à la cybersécurité ou aux changements climatiques, rend ces risques souvent difficiles à assurer ou faiblement mutualisés. L’intérêt pour des dispositifs de couverture internalisés, plus agiles et mieux adaptés aux profils de risque spécifiques des groupes concernés est alors renforcé.

Des avantages renforçant la résilience de l'entreprise

La mise en place d’une captive de réassurance confère à l’entreprise des leviers stratégiques et financiers significatifs, participant activement à sa résilience face aux aléas assurantiels et économiques. Si la réduction des coûts d’assurance constitue un bénéfice immédiat, les gains les plus structurants résident dans l’amélioration du pilotage des risques et dans la flexibilité qu’offre un tel dispositif.

En effet, la captive permet une gestion fine, centralisée et personnalisée des risques, tenant compte des spécificités opérationnelles, sectorielles et géographiques du groupe. Elle offre la possibilité de calibrer plus précisément les niveaux de couverture, de définir un programme de réassurance sur mesure, et d’ajuster dynamiquement les franchises, les limites et les primes en fonction de la sinistralité réelle et de la stratégie de rétention.

Par ailleurs, les captives facilitent la mutualisation intra-groupe des expositions, en regroupant les risques de différentes entités ou filiales sous une structure commune. Ce mécanisme favorise une meilleure diversification et contribue à lisser les chocs assurantiels, tout en renforçant la discipline de gestion des risques à l’échelle du groupe.

Enfin, en internalisant une partie de la gestion des risques, l’entreprise renforce son autonomie stratégique, améliore sa capacité à négocier avec les assureurs tiers grâce à une meilleure connaissance de son profil de risque, et réduit sa vulnérabilité aux cycles de durcissement du marché. Ce positionnement proactif accroît la robustesse de son dispositif de gestion des risques, en cohérence avec les exigences prudentielles et les attentes des parties prenantes en matière de continuité d’activité.

Un cadre fiscal qui évolue pour encourager la domiciliation en France

Dans le passé, de nombreuses entreprises françaises choisissaient de domicilier leurs captives à l’étranger, notamment dans des pays disposant de cadres fiscaux et réglementaires plus favorables, comme le Luxembourg ou les Bermudes. Cependant, pour encourager les entreprises à domicilier leurs captives en France, le cadre fiscal et réglementaire français est en train de s’adapter.

Des réformes récentes, issues de la loi finance de 2023, visent à offrir plus de flexibilité et d’attractivité pour les captives françaises. Cela inclut des ajustements dans la taxation des captives, ainsi que des mesures permettant une plus grande souplesse dans la gestion des capitaux propres et des exigences en matière de gouvernance. Ces évolutions devraient permettre à la France de devenir une destination plus compétitive pour la domiciliation des captives, offrant aux entreprises nationales des opportunités de rapatrier leurs captives ou de créer de nouvelles structures directement sur le sol français.

Un processus de création exigeant mais structurant

Les captives sont de véritables opportunités de transformation, permettant d’améliorer la gestion du risque, d’optimiser les coûts assurantiels et de penser une stratégie globale de résilience. Pour autant, leur création n’est pas une décision à prendre à la légère. En effet, celles-ci impliquent de répondre à de nombreuses exigences réglementaires et financières comme mentionné dans le guide ACPR. En France, les entreprises doivent notamment disposer de fonds propres suffisants — un minimum de 2,7 millions d’euros pour une captive d’assurance et 1,3 million pour une captive de réassurance — et obtenir l’agrément de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR). Le processus de mise en place, qui s’étale généralement sur 9 à 12 mois, débute par une étude de faisabilité approfondie : une étape stratégique permettant d’évaluer la pertinence du projet au regard des risques spécifiques de l’entreprise, de sa structure financière et de ses objectifs de long terme.

La complexité réglementaire et administrative ne doit donc pas être sous-estimée, avec des exigences de reporting et de gouvernance parfois contraignantes. Toutefois, la revue de Solvabilité II vise à alléger ces obligations pour mieux prendre en compte le profil de risque spécifique des captives, en simplifiant le cadre de supervision par extension du principe de proportionnalité. À long terme, les captives doivent rester agiles pour s’adapter aux évolutions réglementaires et aux nouveaux risques émergents, tout en veillant à maintenir un niveau de capitalisation adéquat pour faire face à d’éventuels sinistres majeurs.
Ainsi la création de captives nécessite un accompagnement pour notamment faciliter la montée en compétences sur ces sujets en interne et réfléchir à une vision structurée de la gouvernance des risques.

Nos experts vous accompagnent

Face à ces enjeux, nos experts accompagnent les entreprises de bout en bout, en apportant une expertise pointue sur l’ensemble du cycle de vie d’une captive : depuis la structuration initiale et la définition des besoins, jusqu’à la mise en conformité réglementaire, l’élaboration du plan de gouvernance, l’adaptation aux évolutions du cadre prudentiel et le calcul annuel des exigences réglementaires. Cette approche intégrée permet d’anticiper les contraintes, de sécuriser le projet et d’en faire un véritable levier stratégique de résilience.

La création de captives d’assurance et de réassurance s’inscrit désormais comme une stratégie clé pour de nombreuses entreprises françaises. Cette démarche traduit leur ambition de mieux maîtriser leurs risques, de renforcer leur autonomie et d’accroître leur résilience face à l’incertitude économique. Plus qu’un simple outil d’optimisation, elle marque une redéfinition des rapports entre les entreprises et le secteur de l’assurance, avec une volonté croissante de s’émanciper des modèles traditionnels. L’adaptation progressive du cadre réglementaire et fiscal, couplée à l’expérience accumulée par les entreprises dans ce domaine, devrait conduire à une intensification de cette approche dans les années à venir, transformant ainsi profondément le paysage de l’assurance d’entreprise en France.

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