Le Canada investit 2 milliards de dollars en IA
Le Budget fédéral 2025 prévoit des investissements massifs dans la souveraineté numérique et l’IA pour reprendre le contrôle de ses données et bâtir une infrastructure technologique locale.
Ces dernières semaines, Ottawa a clarifié sa vision d’un futur numérique plus autonome et plus résilient. Entre sa stratégie de souveraineté numérique, les investissements massifs du budget fédéral 2025 et la création d’une Task Force dédiée à l’IA, le Canada se donne comme objectif de reprendre le contrôle de ses données, de ses infrastructures et de sa capacité d’innovation.
Qui peut accéder aux données canadiennes ?
La souveraineté numérique, c’est avant tout une question de pouvoir. Pouvoir décider où sont stockées nos données, qui peut y accéder et sur quelles infrastructures elles circulent. Le Canada veut s’assurer que ses systèmes critiques (on pense à la santé, la sécurité ou aux communications) ne dépendent plus uniquement de l’international.
Mais la réalité est plus complexe. Héberger des données au Canada ne garantit pas un contrôle complet. Les lois comme le Cloud Act américain permettent toujours aux autorités des États-Unis d’accéder à des données détenues par des entreprises américaines, même si elles sont stockées ici. Et depuis 2021, le gouvernement canadien a dépensé plus de 1,3 milliard de dollars en services infonuagiques américains pour des applications dites essentielles.
Même lorsqu’un service est « canadien », il peut reposer sur des composants étrangers : des puces fabriquées ailleurs, des chaînes d’approvisionnement mondiales ou des outils logiciels sous d’autres juridictions. C’est ce qui rend la pleine souveraineté numérique si difficile à atteindre.
L’IA comme moteur d’indépendance
Le budget fédéral 2025 s’inscrit dans la continuité de cette vision. Le gouvernement transforme les principes de souveraineté en actions concrètes, misant sur l’intelligence artificielle comme pilier stratégique.
Avec une marge de manœuvre budgétaire enviable, Ottawa investit jusqu’à 2 milliards de dollars pour bâtir une infrastructure numérique nationale solide. De cette somme, 700 millions serviront à soutenir les centres de données privés au Canada, 1 milliard à renforcer les supercalculateurs publics et les infrastructures sécurisées, et 300 millions à donner aux PME un meilleur accès à des capacités de calcul IA locales.
En ce sens, Cohere, une entreprise torontoise spécialisée en IA générative, recevra notamment 240 millions pour implanter un centre de données au pays. Ce genre d’investissement vise à réduire notre dépendance technologique et à stimuler un écosystème d’innovation local, capable de rivaliser avec les géants étrangers.
Une stratégie nationale en construction
Le dernier morceau de la démarche du gouvernement canadien sera le déploiement d’une plus grande stratégie canadienne en matière d’intelligence artificielle. Pour ce faire, le Canada a mis sur pied l’AI Strategy Task Force en septembre 2025, un groupe de spécialistes de l’IA dont des chercheurs, des leaders de l’industrie et des représentants de la société civile.
Leur mandat est de taille: établir une vision à long terme pour le développement responsable de l’IA, orienter les investissements, renforcer les infrastructures, former la main-d’œuvre et positionner le Canada dans la compétition mondiale.
Innover en local
Cette démarche législative représente un changement de posture pour le Canada qui veut redevenir maître de ses outils, de ses données et de son avenir technologique. En investissant dans ses propres infrastructures et dans l’intelligence artificielle, il cherche à bâtir une économie capable de créer, d’héberger et de protéger ses innovations ici même.
Mais la souveraineté numérique concerne aussi chaque organisation, chaque équipe TI, chaque professionnel qui choisit ses fournisseurs, ses plateformes et ses pratiques. Il faut développer le réflexe de concevoir, intégrer et moderniser des solutions faites pour le contexte canadien, tout en assurant performance, sécurité et indépendance technologique.